Dès le début de son allocution du dimanche 14 juin, Emmanuel Macron a annoncé en une seule phrase que l’école redevenait obligatoire pour tous à compter du lundi 22 juin, dans des conditions normales. Alors que depuis plusieurs semaines, il avait décrété que le retour des élèves à l’école était soumis au volontariat des familles, il a ainsi balayé d’un revers de main les organisations minutieuses préparées pendant des semaines par les équipes qui devaient nous conduire à la fin de l’année ! Une nouvelle fois, quelle preuve de mépris à l’égard des personnels qui ont travaillé inutilement et se voient contraints de mettre en oeuvre une énième nouvelle organisation, pour les deux dernières semaines de l’année scolaire ! Quel mépris également pour les élèves qui reprenaient à peine un nouveau rythme, sans parler de leurs parents qui vont devoir, une nouvelle fois, revoir leur organisation.
En réalité, cette annonce présidentielle est un nouveau mensonge puisqu’au moment même où parlait Emmanuel Macron sortait un décret indiquant que la distance physique d’un mètre entre les élèves était maintenue. Au vu de la configuration des locaux dans la plupart des établissements et des effectifs habituels dans les classes, il sera en fait impossible d’accueillir de nouveau la totalité des élèves. Et de qui sera-ce la faute ? Des profs, encore une fois, profs qui subissent déjà une campagne de dénigrement d’une violence inédite dans les médias, vivement dénoncée par le SNES-FSU.
En sous-main, la nécessité de permettre une plus large reprise de l’économie. Mais à quel prix ? Alors que la circulation du virus semble enfin en recul dans notre pays, est-il vraiment raisonnable de renoncer au protocole sanitaire en vigueur et de faire prendre le risque collectif d’un rebond de l’épidémie ? Et peut-on exposer individuellement les élèves et les personnels à un risque sanitaire, après avoir tant insisté sur les gestes barrières et la nécessaire distance physique ?
Le Président semble avoir oublié que la vie à l’école ou au collège ne se résume pas à la salle de classe. Quid des transports scolaires qui limitent les places ? Quid des cours de récréation qu’il avait fallu repenser ? Quid des couloirs étroits et des cantines qui peinent déjà à nourrir un nombre extrêmement réduit d’élèves ? Quid des personnels de service contraints à des nettoyages réguliers et approfondis, plus que jamais en première ligne depuis le 11 mai ?
Encore une fois, ces nouvelles annonces posent bien plus de questions qu’elles n’apportent de réponses, alors même que cette extension de l’accueil ne s’appliquera que pour deux semaines puisque les vacances commencent le 4 juillet. C’est donc pour deux semaines qu’on entend remettre à plat toute l’organisation de ces dernières semaines ! c’est donc pour deux semaines qu’on prend le risque d’alléger les garanties sanitaires ! Ce n’est pas sérieux, et les élèves comme les personnels méritent davantage de considération et de respect de la part du Président de la République.
Et la pédagogie dans tout ça ?
Grande absente dans cette ultime ré-organisation du temps scolaire, la pédagogie est une nouvelle fois sacrifiée. Il s’agit d’affirmer qu’on retourne à l’école, sans se demander comment, ni pourquoi. Dans certains collèges, les apprentissages ont perdu tout leur sens, et les heures de cours sont transformées en soutien scolaire amélioré. Parfois, les élèves ne sont même plus avec leur classe, ni avec leurs professeurs, semant la confusion sur l’enjeu du retour à l’école. Le ministère escamote ces questions, renvoyant hors de la classe la résolution des problèmes, comme il l’avait déjà fait avec la mise en place de Devoirs Faits. Ainsi, puisque l’année scolaire n’a plus de sens, ce serait pendant les « Vacances Apprenantes » que les élèves viendraient combler les difficultés que l’école n’a pas su accompagner. Plus il malmène les conditions collectives d’enseignement, plus Jean-Michel Blanquer développe des béquilles en-dehors de la classe pour faire croire qu’il s’attaque aux inégalités sociales alors qu’il n’a de cesse que de les creuser. En ce sens, le dispositif des 2S2C constitue une nouvelle menace pour nos enseignements et les syndicats de la FSU entendent bien ne pas le laisser imposer.
Au contraire, le SNES-FSU réaffirme la nécessité d’un plan d’urgence pour la rentrée 2020, sur laquelle le ministre reste désespérément muet. Quelles que soient les conditions sanitaires au mois de septembre, il n’est en effet pas envisageable que la rentrée se déroule dans les conditions envisagées au mois de janvier, avec des classes surchargées et des postes de profs supprimés un peu partout. Il faut au contraire des moyens suffisants pour accompagner les élèves après une année on ne peut plus chaotique. Cela devrait constituer le début de ce nouveau chemin que le Président envisage de dessiner...