Depuis de nombreuses années, les moyens mis à disposition des collèges et des lycées sont en forte diminution et le seront encore à la rentrée 2022. Cela implique un alourdissement de la charge de travail de chaque enseignant avec un service augmenté (2de HSA non refusable) et un nombre d’élèves à prendre en charge toujours plus important. Cette intensification du travail s’accompagne d’un discours managérial qui consiste à créer les conditions de l’acceptabilité par tous de ces dégradations. Être conscient de ces discours fictionnels, les repérer et les contrer est la première étape pour reconquérir collectivement des conditions de travail acceptables pour le service public d’éducation.

Voici les éléments les plus souvent entendus et les arguments qu’on peut y opposer :

  • « Les DHG sont en baisse car les effectifs sont eux aussi en forte baisse ».
    Discours qui laisse penser que les baisses de moyens sont proportionnelles aux évolutions des effectifs et que par conséquent, l’encadrement des élèves ne seraient pas dégradé. C’est faux à l’échelle nationale puisque pour 63 662 élèves de plus depuis 2017, 7 490 emplois ont été supprimés dans le second degré avant cette rentrée 2022. Localement, quand les effectifs baissent les moyens retirés peuvent être très importants et en aucun cas proportionnés. Ainsi en 2021, dans les collèges de la Manche, 33 ETP avaient été retirés en heures postes pour une baisse de seulement 215 élèves prévus : en moyenne donc pour 6,5 élèves en moins, un poste de professeur a été supprimé.
  • « La DHG de l’établissement est très juste parce que les petits établissements consomment trop de moyens ».
    S’il est vrai que les effets de seuils peuvent permettre d’avoir des effectifs par classe moins élevés dans les petits collèges par exemple, ceux-ci ne sont pas « surdotés » et il n’est pas rare que certains niveaux aient des effectifs par classe importants. Ce discours permet évidemment de mettre en concurrence les établissements entre eux et de faire pression sur les personnels des petits pour attirer des élèves à coup de « projets innovants », d’ « expérimentations » diverses qui épuisent les personnels sommés de s’y investir (et parfois sommés de les suspendre à l’arrivée d’un nouveau CE) . Il faut alors rappeler l’évidence : la pénurie de moyens pour faire fonctionner l’ensemble des établissements en raison d’un manque d’investissement dans l’éducation.
  • « Il serait bien que vous acceptiez de prendre des HSA pour éviter à votre collègue de partir en poste partagé, ou pour éviter de faire venir un TZR pour peu d’heures, ou pour éviter de partager une classe en 2…  ».
    Ce discours très culpabilisant répond à la nécessité d’imposer une part toujours plus importante d’HSA à chaque professeur car celles-ci sont de plus en plus nombreuses dans la DHG des établissements. Il révèle le peu de marge de manœuvre pour ajuster les services aux besoins de l’établissement. Rappeler que les choix budgétaires ne sont pas les vôtres, que 2 HSA non refusables c’est déjà beaucoup et que cela dégrade déjà beaucoup l’encadrement et le suivi dus aux élèves.
  • « Merci de passer dans mon bureau dès que possible... »
    Beaucoup de chefs convoquent des collègues pour leur proposer des heures en groupes ou des heures supplémentaires afin d’éviter un complément de service pour une autre discipline. Ils prennent soin de flatter et de rappeler les qualités exceptionnelles de l’agent… C’est aussi malheureusement l’occasion de créer une source de divisions entre les personnels. En effet, au jeu des petites réunions, le chef d’établissement s’octroie – et lui seul – une vue d’ensemble de la DHG, donne des moyens à une discipline au détriment d’une autre et cela favorise l’apparition de tensions. Rien de mieux pour rendre l’acceptation de la DHG du chef inévitable. Le collectif par les heures d’information syndicale par exemple permet d’éviter les conflits et les tensions. Les équipes doivent ainsi s’approprier la DHG en ayant eux aussi une vue d’ensemble, et comprendre ce qui manque pour enseigner dans de bonnes conditions, pour ensuite agir et communiquer.
  • « En tant que premier pédagogue de l’établissement... »
    Les volontés pédagogiques du chef sont au cœur de sa répartition de la DHG. Elles correspondent aux commandes de l’institution, selon les modes pédagogiques du moment et se traduisent parfois par des formes de chantage. « Si vous acceptez la classe sans notes je vous donne des groupes », « je souhaite davantage d’interdisciplinarité et je vais vous donner des heures pour cela si vous acceptez », « je peux donner à un.e autre collègue les heures supplémentaires que vous refusez mais je souhaiterais que vous intégriez le projet de classe miroir… ». Les projets pédagogiques doivent émaner des enseignants. Il est important qu’ils gardent la main sur ce point. Le chef d’établissement n’est en aucun cas le premier pédagogue de l’établissement. Son métier n’est pas de pratiquer la pédagogie. En revanche, il pourra montrer à sa hiérarchie sa capacité de manager, piloter, conduire les équipes, impulser des dynamiques, ce qui est bon pour sa carrière. Il est donc impératif de rappeler l’article L912-1-1 du code de l’éducation sur la liberté pédagogique des enseignants. Sur ce point, certains chefs se font un plaisir de minorer cet article en laissant sous-entendre qu’il s’agit d’un principe suranné. On peut rétorquer qu’un chef d’établissement, représentant l’État, ne peut négliger la loi.

Retour vers le guide DHG.